Le secrétaire général de l'OTAN se dit prêt à « travailler de nouveau » avec Donald Trump, mais la réélection du président américain soulève des interrogations : l’alliance pourra-t-elle préserver son unité face aux défis imposés par la vision transactionnelle de Trump ? En Europe, des voix s’élèvent pour garantir une « sécurité collective », alors que le risque d’un désengagement américain plane sur l’OTAN.
Président Donald Trump. Image La presse.
Les critiques de Trump et les risques pour l'unité de l'OTAN
Lors de son premier mandat, Trump avait exercé une pression intense sur les alliés européens, en particulier l'Allemagne et la France, les accusant de ne pas suffisamment contribuer à la défense collective. Avec son retour à la Maison-Blanche, cette pression pourrait reprendre de plus belle, menaçant l'unité transatlantique, qui reste essentielle pour la sécurité en Europe.
En réduisant potentiellement l’engagement américain, Trump pourrait encourager certains pays européens à envisager des solutions alternatives, notamment par une coopération accrue au sein de l'Union européenne. Cette quête d'une autonomie stratégique européenne pourrait affaiblir l’OTAN en tant que garant de la sécurité du continent.
Le secrétaire général de l'OTAN a cependant souligné l'importance de cette collaboration pour la paix : « L'Organisation rassemble 31 amis et alliés des États-Unis, qui contribuent à promouvoir les intérêts de ce pays, à démultiplier sa puissance et à protéger sa population. » Cette unité reste primordiale dans un contexte de défis sécuritaires croissants.
Le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte. AFP image.
Un possible retrait américain et ses implications géopolitiques
Si Trump adopte une posture plus isolationniste, un retrait partiel ou même total des forces américaines stationnées en Europe pourrait être envisagé. Une telle décision représenterait un coup dur pour l'OTAN, surtout pour des pays comme la Pologne et les États baltes, mais aussi pour l'Ukraine, qui reste profondément affectée par l’agression russe. Dans ce contexte, la réaction du président ukrainien Volodymyr Zelensky à l'élection de Trump montre son espoir d’une continuité dans le soutien américain : « Nous comptons sur un soutien bipartisan continu en faveur de l’Ukraine aux États-Unis. »
Zelensky a rappelé son entretien avec Trump en septembre dernier, lors duquel ils avaient discuté d’un « Victory Plan » pour mettre fin à l'agression russe et renforcer le partenariat stratégique entre les deux pays. Il a exprimé sa confiance dans la doctrine de Trump de « paix par la force », affirmant que « ce principe peut réellement rapprocher une paix juste en Ukraine ».
Pour l’Ukraine, une réduction de l'engagement américain en Europe pourrait compliquer la défense contre l'expansionnisme russe. En cas de retrait, la Russie pourrait percevoir une opportunité d’intensifier ses actions en Ukraine et en Europe de l’Est. Zelensky a d’ailleurs souligné que l’Ukraine, « l’une des plus puissantes forces militaires d’Europe », s’engage à assurer la paix à long terme sur le continent, en coopération avec ses alliés, dont les États-Unis.
La situation en Ukraine incarne bien les défis d’une OTAN affaiblie : sans l'appui ferme des États-Unis, les membres européens et leurs partenaires devront redoubler d’efforts pour maintenir un équilibre géopolitique dans une région déjà marquée par de fortes tensions.
Néanmoins, le secrétaire général a rappelé la capacité de dissuasion de l'OTAN : « La collaboration qui s’exerce au sein de l’OTAN a un effet dissuasif sur les agresseurs potentiels et contribue à la sécurité collective des Alliés. » Une affirmation qui pourrait renforcer la confiance des membres européens, malgré les incertitudes.
Vers une OTAN transactionnelle ?
La vision de Trump, souvent qualifiée de transactionnelle, pourrait également transformer la nature même de l’alliance. Son approche, consistant à considérer les relations internationales sous l’angle des coûts et bénéfices financiers, pourrait pousser l'OTAN à évoluer vers un modèle où chaque membre "paie" explicitement pour sa propre sécurité.
Lors d’un rassemblement en février 2024 en Caroline du Sud, Trump a rappelé une conversation avec un chef d’État de l’OTAN : « Un des présidents d'un gros pays s'est levé et a dit : 'Monsieur, si on ne paie pas et qu'on est attaqués par la Russie, est-ce que vous nous protégerez ?'. Non, je ne vous protégerais pas. En fait, je les encouragerais à faire ce qu'ils veulent. Vous devez payer vos factures », a-t-il raconté. Un tel modèle pourrait fragiliser les principes fondateurs de l'alliance, qui reposent sur la solidarité et la coopération multilatérale.
Un dilemme existentiel pour l’OTAN
La réélection de Trump place l'OTAN devant un choix difficile. Soit l'alliance se conforme aux exigences de Trump, risquant ainsi de perdre en cohésion et en efficacité, soit elle se divise, chaque pays cherchant des solutions de sécurité indépendantes. Dans les deux cas, cette situation pourrait fragiliser l'alliance transatlantique et remettre en question l’ensemble de l’architecture de sécurité mondiale.
Malgré ces incertitudes, le secrétaire général de l’OTAN se montre optimiste, affirmant que l’Alliance est « plus forte » et « plus unie », avec « des Alliés plus nombreux » et des « budgets de défense en hausse ».
Le second mandat de Trump pourrait donc représenter un tournant historique pour l'OTAN. Reste à voir si cette organisation, qui a résisté aux crises durant plus de sept décennies, saura s’adapter ou si elle risque de perdre sa raison d’être face à cette nouvelle donne politique.
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Commentaires
J’ai trouvé le sujet pertinent et intéressant , bien que je ne sois pas calée en géopolitique , l’article est bien écrit, concis et interroge sur l’élection de trump et les répercussions qu’elle va engendrer pour les Européens….
Très intéressant et bien écrit. Y-a-t’il une opportunité pour les européens de se prendre en main et assurer eux même leur défense. L’OTAN pourrait en sortir renforcée au final.
Article très bien écrit qui me rend nostalgique de l'HGGSP. La question est de savoir si Trump ira bel et bien au bout de sa volonté de se retirer de l'OTAN quitte à lâcher le Royaume Uni, malgré que ce dernier soit l'allié le plus proche des États-unis. Affaire a suivre dans un prochain article je l'espère.