L’engagement étudiant pour la Palestine: un tournant?

Publié le 6 mai 2024 à 19:51

Des étudiants manifestent contre la politique israélienne face à Gaza lors de la cérémonie d'ouverture du printemps de l'Université du Michigan, le 4 mai 2024, au stade du Michigan à Ann Arbor. Photo: Nic ANTAYA pour l’AFP.

 

Selon moi, l’Occident risque de se distancer d'Israël, puisque les mouvements sociaux en faveur de la Palestine gagnent en influence en Europe comme en Amérique du Nord.

 

Les mouvements pro-palestiniens occupent une place de plus en plus centrale au sein des universités européennes, témoignant d’un engagement international croissant en faveur de la cause palestinienne. De l’autre côté de l’Atlantique, aux États-Unis, une mobilisation similaire s’est également propagée dans de nombreuses universités. Cette montée en puissance des mouvements pro-palestiniens parmi les étudiants européens et américains soulève des questions quant aux facteurs sous-jacents qui ont conduit à cette mobilisation croissante: est-ce une réponse à une sensibilisation accrue aux injustices subies par le peuple palestinien, ou cela est-il dû en grande partie à l'évolution des plateformes de communication, comme les réseaux sociaux, qui facilitent la mobilisation rapide et la diffusion d'informations? 

 

France, Italie, États-Unis

 

Chose certaine, le mouvement a le vent dans les voiles. En Italie, les étudiants se sont vigoureusement engagés dans des manifestations, des grèves et des sit-in pour exprimer leur soutien envers les Palestiniens. Rappelons que ces actions visent à condamner l'occupation illégale de certains territoires par Israël depuis des décennies, ainsi que les récentes attaques sur la bande de Gaza, mettant en lumière la crise humanitaire qui en découle. La mobilisation étudiante est également au cœur de l’actualité française. Des manifestations propalestiniennes ont lieu dans plusieurs universités de l’Hexagone, telles que Sciences Po et la Sorbonne à Paris. Ils sont nombreux parmi les étudiants français à rejoindre le mouvement de solidarité avec Gaza.

Cette mobilisation étudiante en France se veut aussi une nouvelle vague de protestation contre l'impérialisme et le militarisme, en particulier contre les formes qu’ils prennent dans la reprise du conflit israélo-palestinien. Les étudiants français rejoignent ainsi sur leurs homologues américain et italiens, mais aussi canadiens, comme on le voit ici aux universités McGill et de Colombie-Britannique. Cette action appelle non seulement à un cessez-le-feu à Gaza, mais aussi à couper les investissements liés à Israël.

En France, certains campus ont également été le théâtre d’interventions policières pour disperser les étudiants propalestiniens, soulevant des questions sur la liberté de manifester et la répression des mouvements étudiants. L'appel lancé par l'université de Birzeit en Palestine pour une mobilisation mondiale contre le génocide perpétré par Israël fait partie d’un vaste éventail d’actions en soutien à la cause palestinienne.  Les étudiants italiens ont demandé le retrait de leur université d'un programme d'échange académique avec des institutions israéliennes. De même, plus de 4000 universitaires italiens ont signé un appel à un cessez-le-feu, démontrant ainsi l'engagement de la communauté académique dans la défense du peuple palestinien.

 

Du Vietnam à Gaza

La montée en puissance du mouvement étudiant pour la Palestine en Europe présente des similitudes avec les mobilisations anti-impérialistes du passé, notamment dans les années 1960. Le phénomène rappelle en effet l’opposition à la guerre du Vietnam, avec une approche qui va au-delà des simples marches pour inclure des «camps de protestation» sur les campus. 

Les militants propalestiniens d’aujourd’hui critiquent non seulement le soutien américain à Israël et au conflit Israël-Hamas, mais aussi les structures mondiales de pouvoir perçues comme engendrant des rapports de force inégaux. 

 

Un défi pour les gouvernements en place

 

L'Occident risque de se distancer d'Israël, puisque les mouvements sociaux en faveur de la Palestine gagnent en influence et impactent les politiques nationales. En transcendant les clivages traditionnels gauche/droite, ces mouvements rassemblent des individus de divers horizons politiques. Cette convergence fait pression sur les institutions politiques. Cette influence est particulièrement marquée aux États-Unis, en Italie et en France, où la solidarité estudiantine avec la Palestine engendre des tensions et des défis pour les gouvernements en place. Ces derniers font face à des critiques croissantes pour leur soutien à Israël, malgré les violations manifestes par l’État hébreu du droit international et des droits de l'homme. 

De nombreuses voix au sein de la société civile réclament une désolidarisation avec Israël, en s'appuyant notamment sur le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions).  «Depuis 17 ans, le siège de Gaza par Israël a mis à l'épreuve le système juridique international et les droits de l'homme. Malgré 76 ans d'apartheid et de violations d'Israël, les Nations Unies ont échoué. Le soutien occidental au génocide en direct pourrait sonner le glas du système juridique international. La solution évidente dès le départ: des sanctions», estime Saleh Hijazi du Comité BDS Palestine. Un autre exemple concret de l'influence de ces mouvements est la coalition «Free Palestine Party», qui devrait déposer des listes aux élections européennes de juin dans plusieurs pays européens. La cause palestinienne s’impose désormais dans l'arène politique européenne.

Aux États-Unis, la mobilisation de la jeunesse étudiante en faveur de la Palestine confronte l'administration Biden à des défis majeurs. Les étudiants américains ont été comparés aux nazis par Netanyahou, qui y voit une forte résurgence de l’antisémitisme

Les mouvements d’opposition à la guerre dans les années 1960 ont laissé une empreinte significative dans la conscience collective des peuples occidentaux, marquée par un rejet profond de toute forme d'impérialisme et de militarisation dans le monde. Il ne fait aucun doute que la mobilisation actuelle peut être vue comme un prolongement de ce sentiment de rejet et d'engagement en faveur de la justice et de la paix.

 

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